- Terre en vue, mes chéris !

"Mes chéris". Ah ! Quel surnom, franchement. La dame qui avait dit ça, une surveillante chargée d'amener des étudiants sur l'île Utopia, si je ne m'abuse, souriait en regardant l'horizon. Ses cheveux bouclés étaient balayés par le vent marin et je l'imaginais sans peine se battre avec eux, une fois le soir venu, pour les démêler.

Enfin, je ne sais pas pourquoi je m'amuse à vous décrire ça. Ce qui m'excitait le plus, c'était l'information donnée: Utopia, l'île tant désirée, approchait. Je suivais les autres élèves sur le pont (Ne les appelons pas "camarades", ce serait trop donner. Je ne les connaissais même pas.) et m'accoudais à la rambarde du bateau. L'île était là, à bien 200 mètres de moi. Je humais l'air marin en laissant passer un fin sourire sur mes lèvres. Toutes mes ambitions étouffaient sans peine les peurs et appréhensions que j'aurais pu ressentir quant à ma future vie à l'académie. J'avais hâte d'accoster.

Un garçon s'installa à côté de moi. Je lui lançais un regard incertain, mais il m'ignorait complètement. Sans doute rêvassait-il. Soudain, je vis quelque chose qui fit bondir mon coeur. Dans ses mains, placées sur la rambarde... il tenait une pokéball. Je sentis une pointe de jalousie s'emparer de moi. Comment se faisait-il qu'il avait déjà son pokémon ? Ne devions-nous pas venir "les mains vides" ? Le bateau me répondit par un "TÛÛÛÛÛT !" retentissant qui fit sursauter le garçon à la pokéball. Celle-ci s'échappa de ses mains, roula sur le pont et serait déjà tombée à l'eau si je n'avais pas mis un pied devant pour l'arrêter. Le garçon se précipita sur elle :

- Oh, merci, merci !, s'écria-t-il. J'ai bien cru que j'allais la perdre !

- Qu'est-ce qu'il y a dans cette pokeball ?, demandais-je, curieux.

Le garçon me fit un clin d'oeil.

- C'est le pokémon que mon père m'a donné. C'est un Caninos ! C'est pour ça que je ne le fais pas sortir ici...

Un Caninos ? Un pokémon feu ?! Je n'en croyais pas mes oreilles. Mes yeux se plissèrent en une expression accusatrice devant son sourire complice et je répondais du tac au tac :

- Et c'est donc aussi pour ça que tu promenais ta pokéball au dessus de la mer ! Tu voulais le tuer ou quoi ?

Le jeune élève fit la grimace et sembla vouloir s'éloigner de moi. Mais son corps ne bougea pas. Autour de nous, un petit groupe de curieux s'était peu à peu formé depuis la scène de la chute de la pokéball. Une fille s'avança et posa sa main sur l'épaule du dresseur au Caninos.

- Tu sais, je ne pense pas que tu puisses l'emmener sur l'île. Il parait que nous allons tous recevoir un nouveau pokémon une fois là-bas, pour être sur le même pied d'égalité.

Ah. Parfait. Elle en parlait à ma place. Ainsi, ce garçon devrait aussi attendre son tour. Je n'osais pas me l'avouer, mais le fait que ce Caninos avait appartenu à son père m'avait drôlement blessé... Lui, au moins, il avait un père pour penser à lui. Enfin, bref. N'ayant plus rien à faire ici, je décidais de m'éloigner du petit groupe, rêvassant tant que je le pouvais encore de mon futur pokémon. Serait-ce un pokémon à l'énergie électrisante, comme Lixy ? Ou encore un pokémon avec de l'allure comme Absol ? Le bateau finit par accoster et nous descendîmes tous sur la terre ferme. Du regard, je cherchais un indice ou une aide sur ce que je devais faire ensuite. Plusieurs adultes étaient là et semblaient nous prendre en charge un à un. Allez, à quand viendrais mon tour ? Je n'en pouvais plus de regarder les autres rencontrer leur nouveau compagnon de route. Un chenipan, un mangriff, un draco, un parecool,... L'impatience grimpait.

Je remarquais à peine la femme qui s'approchait de moi, et sursautais lorsque j'entendis mon nom :

- Guardia ? Elian Guardia, c'est bien toi ?

Je répondais oui de la tête, tout à coup incapable d'émettre un seul mot. Elle fouilla dans une sacoche et me tendit une pokéball d'un bleu argenté étrangement écaillé... sans pour autant que l'objet ne le soit. J'écarquillais les yeux. Je la trouvais magnifique !

- Voilà ton pokémon. Je vois à tes vêtements qu'il est déjà assortit à toi, plaisanta la femme. C'est une bonne chose. Je te demanderais juste de le faire sortir dans de l'eau, s'il te plait. Pour son bien-être.

- De l'eau ?, répétais-je béatement en prenant l'objet entre mes mains.

Elle ne me répondit pas. Lorsque je levais les yeux, je compris pourquoi. Elle était déjà occupée avec une autre personne. Elle devait en avoir du boulot avec ce monde qui arrivait. Je haussais les sourcils d'un air désinvolte. De l'eau, donc... Mon pokémon était un poisson. La grande question était : Lequel ? Mon coeur battait la chamade tandis que je me mettais en quête d'un coin d'eau sans trop de monde...

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